L'étrange
Noël de Monsieur Jack

Cas
à part dans la filmographie des studios Disney, l'Etrange Noël de Monsieur
Jack, outre la prouesse technique sur laquelle nous allons revenir en
détail, est définitivement un bijou de poésie et de grâce, magnifié
par un Tim BURTON au sommet de son inspiration gothique, et un Henry
SELICK aux commandes d'une mise en scène brillante, avant le plus familial
James et la Pêche Géante.
Situons
en deux mots les tenants et aboutissants du film. Jack Skellington,
"le roi des citrouilles", est le grand ordonnateur des festivités dans
la ville d'Halloween. Lassé de ce rite annuel routinier, il décide
de partir. Il découvre alors par hasard la ville de Noël, qui rayonne
de joie et de liesse. Rentrant chez lui avec la ferme intention de contrôler
la prochaine fête de Noël, il en profite pour faire kidnapper l'illustre
Père Noël. Toute la ville se met alors au travail pour fabriquer des
cadeaux aussi horribles que terrifiants et la nuit de Noël, Jack part
offrir aux enfants ses macabres présents...
NOIR,
C'EST NOIR...
Chef-d'œuvre
indiscutable de noirceur et d'inventivité de tous les instants, ce conte
macabre, trop souvent associé à Tim BURTON (il en a l'empreinte, la
direction artistique globale, mais pas la signature directe), est un
véritable bijou. Comédie musicale qui ne laisse aucun instant de répit
au spectateur scotché aux aventures de Jack Skellington, ce long métrage
peut d'ores et déjà être considéré
comme un classique du cinéma d'animation. Prolongement thématique
du court-métrage Vincent de Tim BURTON (intégralement
en alexandrins !), L'Etrange Noël... fait partie de ces films d'animation
résolument adultes, et assumé comme tel, prompt à
effrayer votre petit neveu ou votre sœur cadette. Tout en l'émerveillant.
L'Etrange
Noël... marque surtout une étape importante dans le domaine, puisqu'il
s'agissait du premier long métrage entièrement réalisé avec la technique
dite stop motion, soit une animation image par image de personnages
faits de pâte à modeler ou d'autres matières... Pas moins de 400 expressions
de visage ont été modelées pour Jack Skellington, le héros du film,
afin de faciliter la tâche des animateurs. Pour le reste, tout
a nécessité un long travail de patience, de précision,
et d'efforts mis en communs. La stop motion a en effet cela de
différent de l'animation traditionnelle qu'elle requiert une
extrême patience et un sang-froid à toute épreuve
: un décor bouge d'un millimètre de trop d'une image à
l'autre, un personnage tombe par inadvertance, et le travail de toute
une semaine tombe également... à l'eau. Résumons
le principe de base de cette technique : chaque séquence est
composée d'une succession d'images, lesquelles sont minutieusement
travaillées et photographiées une par une. Un aspect important
concerne la recherche d'un mouvement réaliste. Or le plus anodin
des gestes est d'une complexité impensable. Exemple : un personnage
lève un bras, geste banal en apparence... Il s'agit pourtant
de décomposer très précisement le mouvement, puis
d'en photographier également les intervalles, étapes intermédiaires
indispensables à une meilleure fluidité. A raison de 24
images par seconde, l'on comprend aisément la complexité
d'une telle production !
L'ÉTRANGE
PRODUCTION MADE IN DISNEY
Cette
production Tim BURTON est aussi et surtout une vaste comédie musicale
macabre qui offre son lot de saynètes réjouissantes, du Kidnapper
le Perce Oreille des machiavéliques Am, Stram et Gram au surréaliste
Boogie Blues (séquence disneyenne sous acide), en passant
par l'entraînant Que vois-je ? d'un Jack Skellington découvrant
la féerie de Noël... Seule véritable empreinte des producteurs
de chez Disney ? Volonté délibérée de raconter
une histoire par le seul biais de séquences (en)chantées
? Toujours est-il que sur 1 h 13 de film, plus d'une heure est intégralement
musicale. Autrement dit impossible de passer à côté,
au risque de saturer de dialogues chantés.
En
fin de compte, le film d'Henry Selick, improbable production des studios
Disney sous acide, laisse sur sa faim. La magie opère, on ne
s'ennuie pas un instant, mais le fait est qu'on ne voudrait quitter
cet univers pour rien au monde, malgré son aspect volontairement glauque
(voire malsain). Autrement dit le long métrage n'est nullement
bâclé, creux ou simple tour de force (la prouesse visuelle
pourrait se suffire à elle-même), mais son charme est tel
qu'il appellerait à devenir une franchise. Etrange sentiment
devant cet Etrange Noël..., qui laisse réellement sur sa faim.
Le fait d'en vouloir toujours plus est sans doute la marque d'un grand
film.
Gersende Bollut

Fiche d'identité
- Titre original : Nightmare Before Christmas.
- Origine : Etats-Unis - Couleurs - 1 h
13 min.
- Date de sortie France : novembre 1994.
- Production : Tim BURTON et Denise DiNOVI.
- Réalisateur : Henry SELICK.
- Scénario : Caroline THOMPSON et Michael
McDOWELL.
- Doublage VO/VF : Danny ELFMAN / Olivier
CONSTANTIN, Chris SARANDON / Dorothée GEMMA, Catherine O'HARA / Nina
MORATO, William HICKEY / Bernard TIPHAINE, Glenn SHADIX / Daniel BERETTA...
- Musique : Danny ELFMAN.
- Box-Office France : 703.016 entrées.
- Sortie DVD : 27 novembre 2002.
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Lien Internet :
http://www.etrange-noel.net
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"Chef-d'oeuvre
de noirceur et d'inventivité de tous les instants, ce conte macabre
est un véritable bijou empreint de poésie"
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