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Merlin l'Enchanteur


Dans la veine d'un Robin des Bois -ce dernier s'en inspirera ouvertement au niveau graphique-, l'adaptation disneyenne du légendaire magicien Merlin fut la première tentative du studio (hélas encore l'une des seules à l'heure actuelle) dans le domaine de l'héroïc-fantasy, développant volontairement le côté divertissant, à l'inverse du plus ténébreux Taram et le Chaudron Magique réalisé ultérieurement (et à mille lieux du rotoscopique Seigneur des Anneaux de Ralph BAKSHI).

Inventeur farfelu qui semble préfigurer le Doc Brown de Retour vers le Futur -voyageant dans le temps pour en ramener les dernières avancées technologiques-, Merlin prend en main la destinée du frêle Arthur, dit Moustique, futur roi d'Angleterre qui s'ignore (excusez du peu).


C'EST UN JARDIN EXTRAORDINAIRE

Cette rencontre est prétexte à une succession de séquences animalières relevant à la fois du pur délire animé -Merlin et Moustique déambulant en poissons, en écureuils, en oiseaux...- et du voyage initiatique : de chaque expérience est retirée une leçon de vie. Par le jeu et une apparente décontraction, Merlin pousse à chaque fois son jeune disciple à raisonner plutôt qu'à agir de façon impulsive. A se servir de sa tête avant tout. Quitte d'abord à faire des erreurs, mais que celles-ci puissent permettre de changer le comportement et d'être par la suite plus avisé dans ses choix. Le rapport maître-disciple est d'ailleurs explicite dans le film : l'apprentissage de l'alphabet, les maximes pleines de bon sens ("Quand on a touché le fond, on ne peut que monter") et ces fameuses expériences animalières peu orthodoxes... mais très formatrices pour le jeune Arthur ! Une éducation qui a le mérite d'allier sens de la pédagogie et aspect ludique.

Une petite parenthèse sur la scène d'anthologie où le hibou (Archimède) est plié en quatre, suite aux "bons conseils" de son maître Merlin pour apprendre à voler au jeune Arthur. Séquence proprement irracontable et sans nul doute unique dans la filmographie de la firme yankee, dans la même veine surréaliste de la séquence d'un Dumbo ivre...

Grand moment du film également : le duel de sorcellerie entre l'enchanteur Merlin et la sorcière Mme Mime, d'un manichéisme réjouissant. Ou quand une question d'honneur prend une tournure inattendue et dantesque, offrant au spectateur une séquence inoubliable au bestiaire improbable : tortue, serpent, rhinocéros, lapin ou même chèvre, tout y passe ou presque, y compris dragon chimérique et virus microscopique. Au point que le débat pourrait être lancé : qui du Roi Lion ou de ce Merlin l'Enchanteur contient le plus d'espèces animales différentes ?... Vous dites ? La séquence de l'Arche de Noé dans Fantasia 2000 ? On peut dire que vous avez de la répartie.


CULTIVONS NOTRE JARDIN...

Ajoutons à ce portrait hautement flatteur d'un film mésestimé le running gag du loup affamé (absolument im-pa-ya-ble), les chansons qui savent se faire discrètes et agréables, et les petits clins d'oeil amusants et bien vus -Merlin revenant de notre cher St Trop', déçu par l'affluence croissante du tourisme !-, et l'on saisit aisément la place unique occupée par ce film dans toute la filmographie des productions Walt Disney.

Avec toute une sémantique largement appuyée tout du long, que l'on pourrait symboliser par un jardin. En effet, concrètement le long métrage nous invite à un bestiaire impressionnant (la forme : un jardin exotique), et Merlin entreprend de faire l'éducation du jeune Arthur... (le fond : encouragement à la réflexion, et donc rappel d'une célèbre formule du Candide de VOLTAIRE : "Il faut cultiver son jardin").

Merlin l'enchanteur est l'un des derniers classiques de l'âge d'or de la firme, et un film d'animation qui excelle aussi bien dans l'émotion pure (la révélation du destin de Moustique) que dans l'humour déjanté (les saynètes avec les protagonistes transformés en animaux). Soit un subtil dosage d'humour, d'action moyenageuse et d'aventure, pour 1 h 19 de magie à l'état pur.

Gersende Bollut



Fiche d'identité


- Titre original : The Sword in the stone.
- Origine : Etats-Unis - Couleurs - 1 h 19 min.
- Date de sortie France : 25 décembre 1963.
- Production : Walt DISNEY.
- Réalisateur : Wolfgang REITHERMAN.
- Scénario : Bill PEET.
- Doublage VO/VF : Karl SWENSON/Jean PASQUALI (Merlin), Rickie SORENSEN/Dominique MOURIN (Arthur - Moustique), Junius MATTHEWS/HIERONIMUS (le hibou Archimède), Martha WENTWORTH/Lita RECCIO (Madame Mime), Sebastian CABOT/Claude BERTRAND (Hector)...
- Musique : George BRUNS.
- Box-office France : 6.133.628 entrées.
- Sortie DVD : courant 2003.
- Lien Internet : www.disney.fr/DisneyVideos

 

"Vous ne parviendrez jamais à faire des sages si vous ne faites d'abord des polissons"

J.J. Rousseau,
à propos de l'éducation des enfants