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Spider-Man 2



Avec la suite tant attendue de l'un des chefs-d'œuvre de films traitant de super-héros, aux côtés des deux Batman de Tim BURTON, Sam RAIMI réalise un long métrage encore plus abouti que le précédent, libéré peut-être des doutes quant à la réception du public au vu du succès du premier opus. Toujours faussement classique, Spider-Man 2 est un régal cinématographique.


MEA CULPA

Pour commencer, je tiens à revenir sur un point de détail concernant Spider-Man premier du nom sur lequel, je l'avoue, je m'étais trompé. La romance, qui comme le reste du film emprunte à d'autres blockbusters avec super-héros ses éléments, n'est pas élaborée sur le mode du ridicule. Il s'agit d'un parti-pris volontaire de traitement qui permet de s’attacher au personnage de Peter Parker, grand sentimental fragile qui doit affronter des dangers incroyables. Cependant, cette romance reste englobée dans la réalisation et des syntagmes sont repris d'autres films pour ces scènes comme pour les séquences d'action par exemple (voir dossier Spider-Man). Je ne reviens donc pas sur l'interrogation plus générale que porte Sam RAIMI sur les blockbusters, confirmée récemment dans différentes interviews par ses propos sur la liberté énorme qu'on lui a accordé dès le premier film.

Dans Spider-Man 2, le réalisateur pénètre plus profondément dans l'univers de Peter Parker, dans sa galère quotidienne, et le film comporte une ambiance moins lisse que son prédécesseur. Les couleurs déjà sont moins flashy, plus sombres, tout comme le costume de notre tisseur de toiles. Mais surtout la vie à New York, dans ce qu’elle a de plus maussade, nous est montrée de manière encore plus profonde. Ce n'est plus par interposé que le spectateur subit les malheurs de la vie avec Mary Jane qui se voit disputer par un père infect ou par son patron devant le snack, ce n'est plus non plus elle qui galère pour travailler ou se fait agresser dans une ruelle. Cette fois, c'est directement Peter qui, loin du grand appartement chic qu’il partageait avec Harry grâce à Norman, se retrouve dans un minuscule studio insalubre, subit des remontrances de la part de ses employeurs (Jonah Jameson mais aussi le livreur de pizzas), voit sa tante dans la difficulté financière, ou encore se prend des coups à l'entrée de l'université ou par son propre meilleur ami Harry Osborn. De même, si dans le premier chapitre Peter hésitait à avouer ses sentiments à M.J. ou voyait Harry envieux du crédit dont il bénéficiait de la part de Norman qui ne s'intéressait guère à son propre fils, ici Peter sait qu'il doit abandonner tout espoir avec M.J. et son ami lui en veut autant qu'à Spider-man. Après tout, Peter est sensé être le photographe personnel de l'araignée… L'identification n'en est que plus douloureuse.

Concernant la mise en scène proprement dite, le thème du double est cette fois surtout présent dans les nombreuses références au premier Spider-Man, qui comme pour le jeu référentiel du précédent long métrage passent par la reproduction de syntagmes complets de film. Cette toile référentielle fait bien sûr écho à celle de Spider-Man 1 mais n'a pas la même finalité. Tout comme dans Evil Dead II il ne s'agit plus de reprendre des éléments de films d'horreur pour jouer avec à l'instar du premier mais de mélanger les genres et de parodier son propre film, dans Spider-Man 2 Sam RAIMI ne s'amuse plus avec la recette américaine du blockbuster mais avec sa propre recette créée dans Spider-man. Le film reste cependant sérieux à la différence d’Evil Dead 2.

Ainsi, le schéma d'évolution de l'action proprement dite est identique au premier volet, à ceci près qu'au lieu de sauver deux fois Mary Jane des griffes du super-vilain et une fois de bandits plus "ordinaires" entre ces deux moments de bravoure, ici Spider-man sauve d'abord sa tante des tentacules d'Octopus, puis laisse se faire agresser un jeune homme par des malfrats, et enfin il sauve à nouveau Mary Jane. Des fragments de film proviennent même nettement de Spider-Man 1 : la scène où Peter se jette à nouveau en sautant entre deux toits mais s'écrase cette fois littéralement à terre, quand la tante tombe d’un immeuble avant d'être rattrapée, la séquence de l'immeuble en feu avec un enfant coincé à l'intérieur, la scène où Peter revoit mieux sans lunettes vers la fin avec la même mise en scène que dans le premier film pour montrer comment il s'en rend compte (vue subjective puis polarisation personnage et répétition de l'action de mettre-retirer les lunettes), ou encore la scène de discussion entre Peter et M.J. dans les deux cours derrière la maison de tante May…

D'autre part, lorsqu'il y a reprise de fragments complets de Spider-Man 1, deux enjeux sont possibles : soit un trait d'humour vient agrémenter la scène, soit la scène représente l'inverse de celle du chapitre primitif. Ainsi les séquences où Tante May tombe dans le vide ou quand Peter saute entre deux toits comportent un aspect amusant. Peter s'écrase au sol après avoir dit dans les airs "Ca va faire mal !" deux fois et déclare une fois à terre : "Ca fait mal !". La tante semble prête à chuter dans une mise en scène ultra-classique dans laquelle le spectateur est mis sous tension, et en réalité elle tombe sur un pan de mur situé quelques centimètres plus bas. Dans les scènes où une chanteuse reproduit la musique de la série d'animation des années 60, le chant est laborieux en plus du clin d'œil (également présent à la fin du générique de Spider-Man 1) tandis que le guitariste du précédent film était plutôt touchant et jouait relativement bien. L'autre enjeu est présent dans la scène de l'immeuble en feu puisque cette fois c'est Peter et non plus Spider-man qui entre en jeu et il n'a plus de pouvoir donc a bien du mal à sauver l'enfant, dans celle des lunettes dans laquelle Peter ne s'aperçoit non plus qu'il voit mieux sans lunettes au début mais vers la fin du film, ou encore dans la séquence dans la cour de la maison de Tante May où ce n'est plus Peter qui cherche l'amour de Mary Jane mais M.J. qui essaye de le voir dans les yeux de Peter.

Cette évolution de structure entre les deux Spider-Man mise en parallèle de manière assez troublante avec celle présente entre les deux premiers Evil Dead (sans parler du générique de Spider-Man 2 qui résume l'histoire du premier tandis que le début d'Evil Dead II est lui aussi un condensé d'Evil Dead), et sachant que Sam RAIMI se consacrera au prochain Spider-Man puis s'arrêtera là donc créera sa seconde trilogie, voilà qui promet si on imagine le dernier volet de Spider-Man identique dans son procédé de mise en scène au dernier Evil Dead, véritable festival guerrier fantastique où les esprits ne se manifestent plus à travers quelques corps humains mais sous la forme d'une armée de squelettes redoutables et très nombreux… Diantre… n’y pensons pas.

Guillaume Briquet



Fiche technique

- Origine : Etats-Unis - Couleurs - 2 h 07 mn.
- Date de sortie France : 14 juillet 2004.
- Production : Laura ZISKIN et Avi ARAD / Sony Pictures.
- Réalisateur : Sam RAIMI.
- Scénario : David KOEPP, Alfred GOUGH, Miles MILLAR, Michael CHABON et Alvin SARGENT, d'après l'œuvre de Stan LEE.
- Casting : Tobey MAGUIRE (Peter Parker / Spider-Man), Kirsten DUNST (Mary Jane Watson), Alfred MOLINA (Dr. Otto Octavius / Doc Ock), Donna MURPHY (Rosalie Octavius), Dylan BAKER (Dr. Curt Connors)...
- Musique : Danny ELFMAN.
- Box-Office France : en cours d'exploitation.
- Sortie DVD : janvier 2005.
- Lien Internet : http://www.s2-lefilm.com/index.php

 

"Je voulais que ce Spider-Man soit plus gracieux mais aussi plus maladroit. Je le voulais plus réel"

Sam Raimi